Le Carnaval martiniquais se distingue par une spontanéité créatrice qui est d’essence populaire. Chaque année, se manifeste un renouvellement vital qui caractérise l’effervescence de l’imaginaire du peuple. Ce sont les quartiers, les communes, les regroupements conviviaux qui engendrent, composent et imposent les thèmes du carnaval. De ce point de vue, le Carnaval martiniquais n’a rien à voir avec ceux du Brésil et de Trinidad plus somptueux, mais incontestablement peut-être moins créatifs. Il s’agit de se livrer en toute liberté à une fête authentique.
Les déguisements et travestis des reines ou des groupes costumés montrent la grande liberté populaire et les capacités d'invention des carnavaliers, mais la population respecte le principe unificateur du mariage burlesque (lundi gras), de la journée en rouge (mardi gras) et de la journée noir et blanc (mercredi des cendres).
Dans les années 50, 60 et 70, les « chars » (chars carnavalesques, dont les décors sont montés sur des camion. Ils sont réalisés par des décorateurs et artisans et portent un thème que les suiveurs à pied illustrent par leurs costumes. La plupart du temps ils sont sonorisés) occupaient les rues de la capitale. Mais ils ont été supplantés depuis par des orchestres de rues évoluant à pied, ce qui permet d’admirer les costumes des musiciens et la chorégraphie des danseurs qui animent ces groupes.
Des scènes et des personnages traditionnels ou plus récents
Les déguisements les plus anciens portent la marque de la fusion culturelle qui permet à notre carnaval de développer son identité dès les premiers âges: personnages inspirés de l'Afrique, de l' Europe, des métiers ou simplement inspirés de faits ou d'histoires fortes.
> Karolin zié loli (caroline) Qui porte qui ? Costume particulier composé d'une structure en trompe l'œil du déguisement représentant un homme avec pour objectif de donner l'impression qu'il est porté à califourchon par la femme.
> Marian lapofig : Ce personnage est entièrement couvert de feuilles de bananier séchées et son expression dans la rue consiste à tournoyer durant sa déambulation..Figue (fig): c'est aussi en langage créole le nom de la banane à la Martinique. Les feuilles servent à fabriquer une tunique végétale, art africain ancestral qui a traversé l'atlantique avec nos ancêtres. Marian lapofig consitue aussi une synthèse comprenant la réminiscence du montreur d'ours du cirque venu à Saint-Pierre d'avant la catastrophe, qui montrait son animal appellé "Marianne", tournoyant devant son public.
> Diablesse : Lafacadio Hearn et les puristes rappellant l'origine du mot disent guiablesse. A l'origine personnage mythique de l'imaginaire créole développé par les contes, c'est un des acteurs du mercredi des cendres, la "diablesse" est vêtue de noir et blanc, elle agite durant tout le cortège carnavalesque une branche du corossolier, pour bien montrer sa tristesse pour la fin de Vaval, l'effigie qui sera brûlée à la fin des vidés.
> Les mariages burlesques : c’est la transgression et l’inversion organisées en cortège : le mari est, presque systématiquement, une femme et la mariée un homme.
> LesTouloulou : Les témoignages des anciens et les écrits nous rapportent que les Touloulous existaient en Martinique il y a plus d'un siècle. C'est une tradition transférée de Saint-Pierre à la Guyane qui en a remarquablement fait son porte drapeau du carnaval de Cayenne. Ce sont des femmes masquées et entièrement couvertes, méconnaissables qui viennent incognito inviter les hommes à danser durant les fêtes de carnaval.
> Vaval : Effigie principale du carnaval, le VAVAL domine de sa taille, de 3 à 4m, les autres participants dans le circuit des vidés. Il apparaît pour les jours gras, participant à chaque après midi de liesse populaire et sera incinéré devant la foule au soir du mercredi des cendres. En général sur le front de mer de la capitale.
> Bwabwa :Pantin de paille affublé d’un costume puis hissé au bout d’une perche, le bwabwa promené en tête des vidés symbolise en le caricaturant, l’évènement, l’incident ou l’individu le plus impopulaire dans la vie sociale ou politique de la cité.
> Neg gwo siro : Par petits groupes, ils s'enduisent de mélasse et de charbon de bois et en parcourant les rues durant le carnaval, s'amusent à effrayer le public ou font mine des salir les spectateurs. On peut associer à cette pratique des réminiscences de l'esclavage ou le souvenir du noir africain à travers cette pratique et la symbolique qui s'y exprime.
> Hommes d'argile : Depuis 2000, un groupe de jeunes de la commune des Trois Ilets, berceau de la poterie artisanale, a constitué un spectacle vivant de qualité notamment présenté pendant le carnaval, où ils apparaissent dans des parades ou sur podium enduits de terre et s'arrêtant souvent pour offrir des tableaux aux spectateurs. Ils s'appellent les "hommes d' argile".
> Bwadjak : Ce mot à la consonance spéciale désigne les (vieilles) voitures, souvent des épaves, retapées, maquillées, surchargées de jeunes quelquefois pétaradantes, qui constituent l'une des originalités du carnaval martiniquais.
¤ Source : Guide du Carnaval, réalisé par le Comité Martiniquais du Tourisme
Le Carnaval en Martinique est une tradition culturelle qui perdure mais qui, considéré par beaucoup de participants comme un moment et un lieu de défoulement et d’expression de tout ce qui est tabou et interdit, connaît des dérives verbales et visuelles qui ne sont pas à la gloire de Dieu et enlaidissent le spectacle. Il est aussi un reflet de notre société. Et cette même violence qui est présente au quotidien, s’exprime également ces jours-là, ce qui ternit souvent la fête. Le chrétien devant être le levain dans la pâte ne peut pas rejeter cette tradition de notre pays, mais peut y participer sans y perdre son âme (exemple des jeunes de l’Espérance fidèles à cette fête et présentant toujours un char original).
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