PSAUME 62 (63), 2, 3-4, 5-6, 8-9
Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube :
mon âme a soif de toi ;
après toi languit ma chair,
terre aride, altérée, sans eau.
Je t'ai contemplé au sanctuaire,
j'ai vu ta force et ta gloire.
Ton amour vaut mieux que la vie :
tu seras la louange de mes lèvres !
Toute ma vie je vais te bénir,
lever les mains en invoquant ton nom.
Comme par un festin je serai rassasié ;
la joie sur les lèvres, je dirai ta louange.
Oui, tu es venu à mon secours :
je crie de joie à l'ombre de tes ailes.
Mon âme s'attache à toi,
ta main droite me soutient.
« Mon Dieu, je te cherche, mon âme a soif de toi... » Tout ce psaume est écrit à la première personne du singulier ; mais, comme toujours dans les psaumes, ce singulier est collectif : c'est le peuple d'Israël tout entier qui peut dire « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube » ...
Et quand il dit « dès l'aube », il veut dire depuis l'aube des temps, car depuis toujours, le peuple d'Israël est en quête de son Dieu. « Mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau » : en Israël, ces expressions sont très réalistes : la terre désertique, assoiffée, qui n'attend que la pluie pour revivre, c'est une expérience habituelle, très suggestive.
Depuis l'aube de son histoire, Israël a soif de son Dieu, une soif d'autant plus grande qu'il a expérimenté la présence, l'intimité proposée par Dieu. Il va jusqu'à dire « Mon âme s'attache à toi », ce qui est une expression très forte : littéralement il faudrait traduire : « mon âme adhère à toi, mon âme est suspendue... accrochée à toi, elle se presse contre toi ».
Pour exprimer son expérience de relation à Dieu, le peuple élu se compare à un lévite : les lévites, (c'est-à-dire les membres de la tribu de Lévi) étaient par naissance consacrés au service du Temple de Jérusalem et ils y passaient le plus clair de leur temps. Il faut donc lire ce psaume en décodant les images : Israël est comme un lévite. Nous avons déjà eu des occasions de le voir, les psaumes sont toujours des prières collectives, mais ils se présentent comme le cri d'un individu isolé : c'est une mise en scène qu'on appelle le revêtement du psaume ; il faut alors lire : Israël est comme l'individu qu'on met en scène (ici un lévite).
On ne s'étonne pas, par conséquent, de rencontrer dans ce psaume de multiples allusions très concrètes à la vie quotidienne d'un lévite dans le temple de Jérusalem. Je les reprends :
« Je t'ai contemplé au sanctuaire » : seuls les lévites avaient accès à la partie sainte du Temple... « toute ma vie, je vais te bénir » ; effectivement toute la vie du lévite était consacrée à la louange de Dieu... « lever les mains en invoquant ton nom » : là nous voyons le lévite en prière, les mains levées... « comme par un festin je serai rassasié » : certains sacrifices étaient suivis d'un repas de communion pour tous les assistants, et d'autre part, vous savez que les lévites recevaient pour leur nourriture une part de la viande des sacrifices ...
Enfin l'allusion la plus flagrante c'est « je crie de joie à l'ombre de tes ailes » : voilà une expression qu'on ne peut comprendre que si on connaît les secrets de l'intérieur du Temple : là, dans le lieu le plus sacré, le « Saint des Saints », se trouvait l'Arche d'Alliance ; pour nous, il n'est pas très facile de nous représenter l'Arche d'Alliance : quand nous disons Arche aujourd'hui, nous risquons de penser à une oeuvre architecturale imposante : les Parisiens penseraient peut-être à ce qu'ils appellent la Grande Arche de la Défense... Pour Israël, c'est tout autre chose !
Il s'agit de ce qu'ils ont de plus sacré : un petit coffret de bois précieux, recouvert d'or, qui abritait les tables de la Loi. Sur ce coffret, veillaient deux énormes statues de chérubins. Les « Chérubins » n'ont pas été inventés par Israël : le mot vient de Mésopotamie. C'étaient des êtres célestes, à corps de lion, et face d'homme, et surtout des ailes immenses. En Mésopotamie, ils étaient honorés comme des divinités... en Israël au contraire, on prend bien soin de montrer qu'ils ne sont que des créatures : ils sont représentés comme des protecteurs de l'Arche, mais leurs ailes déployées sont considérées comme le marchepied du trône de Dieu.
Ici, le lévite en prière dans le Temple, à l'ombre des ailes des chérubins se sent enveloppé de la tendresse de son Dieu depuis l'aube jusqu'à la nuit.
En réalité, ce lévite c'est Israël tout entier qui, depuis l'aube de son histoire et jusqu'à la fin des temps, s'émerveille de l'intimité que Dieu lui propose : et donc, à un deuxième niveau, c'est l'expérience du peuple qui affleure dans ce psaume : par exemple « mon âme a soif de toi, après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau » est certainement une allusion au séjour dans le désert après la sortie d'Egypte et à l'expérience terrible de la soif à Massa et Meriba (Ex 17).
« Je t'ai contemplé au sanctuaire » est une allusion aux manifestations de Dieu au Sinaï, le lieu sacré où le peuple a contemplé son Dieu qui lui offrait l'Alliance... « J'ai vu ta force et ta gloire » : dans la mémoire d'Israël, cela évoque les prodiges de Dieu pendant l'Exode pour libérer son peuple de l'esclavage en Egypte.
Toutes ces évocations d'une vie d'Alliance, d'intimité sans ombre sont peut-être la preuve que ce psaume a été écrit dans une période moins lumineuse ! A un moment où il faut s'accrocher aux souvenirs du passé pour garder l'espérance. Car tout n'est pas si rose : la preuve, les derniers versets (que nous n'avons pas lus aujourd'hui), disent fortement, violemment même, l'attente de la disparition du mal sur la terre... Ce qui prouve bien que les croyants sont affrontés à la souffrance. Israël attend la pleine réalisation des promesses de Dieu, les cieux nouveaux, la terre nouvelle où il n'y aura plus ni larmes ni deuil.
Dans la première lecture de ce dimanche (Zacharie 12, 10...13, 1), Zacharie annonçait la profonde transformation du coeur de l'homme : enfin les yeux et les coeurs s'ouvriront quand ils accepteront de lever les yeux sur le Messie transpercé. Le psaume 62/63 répond en écho : oui, ce jour béni viendra ; vous, peuple élu, en avez déjà un avant-goût ; en attendant sa venue pleine et définitive, recherchez l'intimité avec Dieu, attachez vous à lui, seule sa présence peut combler vos coeurs. « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube : mon âme a soif de toi... Je t'ai contemplé au sanctuaire, j'ai vu ta force et ta gloire. Ton amour vaut mieux que la vie : tu seras la louange de mes lèvres ! »
Et quand il dit « dès l'aube », il veut dire depuis l'aube des temps, car depuis toujours, le peuple d'Israël est en quête de son Dieu. « Mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau » : en Israël, ces expressions sont très réalistes : la terre désertique, assoiffée, qui n'attend que la pluie pour revivre, c'est une expérience habituelle, très suggestive.
Depuis l'aube de son histoire, Israël a soif de son Dieu, une soif d'autant plus grande qu'il a expérimenté la présence, l'intimité proposée par Dieu. Il va jusqu'à dire « Mon âme s'attache à toi », ce qui est une expression très forte : littéralement il faudrait traduire : « mon âme adhère à toi, mon âme est suspendue... accrochée à toi, elle se presse contre toi ».
Pour exprimer son expérience de relation à Dieu, le peuple élu se compare à un lévite : les lévites, (c'est-à-dire les membres de la tribu de Lévi) étaient par naissance consacrés au service du Temple de Jérusalem et ils y passaient le plus clair de leur temps. Il faut donc lire ce psaume en décodant les images : Israël est comme un lévite. Nous avons déjà eu des occasions de le voir, les psaumes sont toujours des prières collectives, mais ils se présentent comme le cri d'un individu isolé : c'est une mise en scène qu'on appelle le revêtement du psaume ; il faut alors lire : Israël est comme l'individu qu'on met en scène (ici un lévite).
On ne s'étonne pas, par conséquent, de rencontrer dans ce psaume de multiples allusions très concrètes à la vie quotidienne d'un lévite dans le temple de Jérusalem. Je les reprends :
« Je t'ai contemplé au sanctuaire » : seuls les lévites avaient accès à la partie sainte du Temple... « toute ma vie, je vais te bénir » ; effectivement toute la vie du lévite était consacrée à la louange de Dieu... « lever les mains en invoquant ton nom » : là nous voyons le lévite en prière, les mains levées... « comme par un festin je serai rassasié » : certains sacrifices étaient suivis d'un repas de communion pour tous les assistants, et d'autre part, vous savez que les lévites recevaient pour leur nourriture une part de la viande des sacrifices ...
Enfin l'allusion la plus flagrante c'est « je crie de joie à l'ombre de tes ailes » : voilà une expression qu'on ne peut comprendre que si on connaît les secrets de l'intérieur du Temple : là, dans le lieu le plus sacré, le « Saint des Saints », se trouvait l'Arche d'Alliance ; pour nous, il n'est pas très facile de nous représenter l'Arche d'Alliance : quand nous disons Arche aujourd'hui, nous risquons de penser à une oeuvre architecturale imposante : les Parisiens penseraient peut-être à ce qu'ils appellent la Grande Arche de la Défense... Pour Israël, c'est tout autre chose !
Il s'agit de ce qu'ils ont de plus sacré : un petit coffret de bois précieux, recouvert d'or, qui abritait les tables de la Loi. Sur ce coffret, veillaient deux énormes statues de chérubins. Les « Chérubins » n'ont pas été inventés par Israël : le mot vient de Mésopotamie. C'étaient des êtres célestes, à corps de lion, et face d'homme, et surtout des ailes immenses. En Mésopotamie, ils étaient honorés comme des divinités... en Israël au contraire, on prend bien soin de montrer qu'ils ne sont que des créatures : ils sont représentés comme des protecteurs de l'Arche, mais leurs ailes déployées sont considérées comme le marchepied du trône de Dieu.
Ici, le lévite en prière dans le Temple, à l'ombre des ailes des chérubins se sent enveloppé de la tendresse de son Dieu depuis l'aube jusqu'à la nuit.
En réalité, ce lévite c'est Israël tout entier qui, depuis l'aube de son histoire et jusqu'à la fin des temps, s'émerveille de l'intimité que Dieu lui propose : et donc, à un deuxième niveau, c'est l'expérience du peuple qui affleure dans ce psaume : par exemple « mon âme a soif de toi, après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau » est certainement une allusion au séjour dans le désert après la sortie d'Egypte et à l'expérience terrible de la soif à Massa et Meriba (Ex 17).
« Je t'ai contemplé au sanctuaire » est une allusion aux manifestations de Dieu au Sinaï, le lieu sacré où le peuple a contemplé son Dieu qui lui offrait l'Alliance... « J'ai vu ta force et ta gloire » : dans la mémoire d'Israël, cela évoque les prodiges de Dieu pendant l'Exode pour libérer son peuple de l'esclavage en Egypte.
Toutes ces évocations d'une vie d'Alliance, d'intimité sans ombre sont peut-être la preuve que ce psaume a été écrit dans une période moins lumineuse ! A un moment où il faut s'accrocher aux souvenirs du passé pour garder l'espérance. Car tout n'est pas si rose : la preuve, les derniers versets (que nous n'avons pas lus aujourd'hui), disent fortement, violemment même, l'attente de la disparition du mal sur la terre... Ce qui prouve bien que les croyants sont affrontés à la souffrance. Israël attend la pleine réalisation des promesses de Dieu, les cieux nouveaux, la terre nouvelle où il n'y aura plus ni larmes ni deuil.
Dans la première lecture de ce dimanche (Zacharie 12, 10...13, 1), Zacharie annonçait la profonde transformation du coeur de l'homme : enfin les yeux et les coeurs s'ouvriront quand ils accepteront de lever les yeux sur le Messie transpercé. Le psaume 62/63 répond en écho : oui, ce jour béni viendra ; vous, peuple élu, en avez déjà un avant-goût ; en attendant sa venue pleine et définitive, recherchez l'intimité avec Dieu, attachez vous à lui, seule sa présence peut combler vos coeurs. « Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube : mon âme a soif de toi... Je t'ai contemplé au sanctuaire, j'ai vu ta force et ta gloire. Ton amour vaut mieux que la vie : tu seras la louange de mes lèvres ! »
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